Avec le tandem Bassirou Diomaye Faye – Ousmane Sonko, on revient à un jeu de rôles plus classique des rapports Président-Premier ministre, sauf qu’on est tellement habitué à avoir des hyper présidents que cela détonne. Mais pour un jeune Président comme le nôtre, qui après des débuts hésitants semble apprendre vite et habite plutôt bien la fonction, avoir un Premier ministre comme M. Sonko est du pain béni.
Certes, l’homme est fantasque, débite des punchlines hors de propos et controversés à l’occasion, a un attrait immodéré pour la foule, et préfère la communion en forme de politique spectacle avec ses militants chauffés à blanc qu’un débat contradictoire ; il n’en demeure pas moins un excellent paravent pour un Président de la République, habitué à être numéro deux, et qui lui doit en grande partie son accession au pouvoir.
D’ailleurs, M. Sonko est la cible exclusive des tirs de la nouvelle opposition qui prend timidement forme depuis l’installation du nouveau régime. Il est le personnage central de toutes les controverses médiatico-politiques de ces trois premiers mois d’exercice du pouvoir
Pendant ce temps, le Président de la République est relativement épargné. Il est le Président jupitérien, comme on disait de Emmanuel Macron au début de son premier quinquennat. Bassirou Diomaye Faye déroule notamment sur la scène internationale pendant que Ousmane Sonko se jette corps et âme dans le bruit et la fureur politique. Nous voilà un peu revenus au système bicéphale de l’ère Senghor-Dia avant la rupture : le premier davantage préoccupé par la politique extérieure tandis que le président du Conseil (Dia) s’occupe de la politique intérieure.
J’ignore s’il s’agit d’une stratégie concertée, elle est tout cas bénéfique pour le Président de la République. Un halo de bienveillance l’entoure depuis sa prise de fonction. Nous n’avons pas comme dans certaines démocraties d’instruments de mesure de la popularité des hommes publiques, mais il est certain que la cote du Président Faye a cru ou tout du moins est demeurée intacte, depuis le 24 mars. Ce qui est plutôt remarquable même si ses détracteurs ne manqueront pas d’objecter que sa présidence est jusqu’ici purement décorative.