L’image empruntée(illustration)
Au Mali, tant que la mendicité persiste, les enfants seront toujours exposés aux pires formes de travail et, pour cela, il faut impérativement une lutte rigoureuse de toutes les parties prenantes. En effet, la mendicité est l’une des pires formes du travail des enfants selon certains experts du domaine de travail. Une ancienne pratique qui consistait seulement à certaines personnes à aller chercher de quoi à se nourrir chez d’autres personnes, mais aujourd’hui la mendicité n’est plus pratiquée de ce que la religion musulmane l’autorise où elle a radicalement changé et en fait à d’autres visages(exploitation des enfants), alors que le code pénal malien l’interdit et la sanctionne en ses articles 183 et 184. Très généralement causée par la pauvreté, cette nouvelle forme de la mendicité qui exploite les enfants peut se classer en trois catégories : les enfants talibés, les enfants jumeaux et les enfants handicapés, quelqu’en soit la catégorie visée ils subissent des pires formes de travail et sont exposés à des risques tels que: la déliquescence, (vagabondage, vol, escroquerie, abus de confiance, prostitution, toxicomanie), la propagation des maladies contagieuses (choléra, tuberculose)….C’est là que beaucoup affirment que la mendicité est la mère des pires formes du travail des enfants. Alors, si les droits qui protègent les enfants contre certaines formes de travail sont les prunelles de tout Etat de droit au monde, il n’en est pas de même pour le Mali qui n’arrive toujours pas à recadrer les choses et mettre un frein aux pires formes du travail des enfants notamment la mendicité. Cette mauvaise pratique à l’égard des enfants est un véritable obstacle à leur épanouissement. Et pourtant ils constituent de tremplin pour l’avenir d’un État.
Pour rappel, Selon l’Organisation internationale du travail, le travail des enfants regroupe l’ensemble des activités qui privent les enfants de leur enfance, de leur potentiel et de leur dignité, et nuisent à leur scolarité, santé, développement physique et mental. Dans un rapport de l’OIT, il est indiqué qu’au début de 2020, sur 160 millions d’enfants engagés dans le travail infantile, 79 millions font les travaux dangereux qui entrent dans le cadre des pires formes du travail des enfants. Et parmi ces enfants travailleurs 9 sur 10 vivent en Afrique, en Asie et dans le pacifique. L’enquête de 2022 de l’Institut National de la Statistique du Mali (EMOP) a prouvé que le travail précoce des enfants concerne un quart des enfants âgés de 5 à 11 ans, cela augmente avec l’âge et touche davantage les garçons que les filles.
A l’en croire, contrairement à certains pays voisins dont le Sénégal et le Burkina Faso, des grands touchés du phénomène mendicité de l’Afrique de l’Ouest, ont exigé une certaine mesure pour réduire voire même éliminer la pratique, le Mali au chevet des choses ne parvient toujours pas à contrôler le secteur comme il veut, mais des efforts sont en train de fournir par l’Etat et plusieurs partenaires notamment des ONGs Humanitaires. À titre d’exemple, la création de la Fédération Nationale des Associations des Maîtres des Ecoles Coraniques du Mali (FENAMEC-Mali) en décembre 2018 dont le but est l’amélioration des conditions d’études et de vie dans les écoles coraniques ainsi que la reconnaissance de l’école coranique dans le système éducatif national. Tout récemment, l’Organisation Internationale World Vision Mali à travers son projet JOFA-ACTE (Joining For Africa) ou Agir Contre le travail des enfants au Mali, piloté par un consortium composé de l’Educo, du Plan International, de Terre des Hommes, du Save the Children, des SOS Children’s Villages, travaille d’arrache-pied à la satisfaction des doléances N°8.7 de l’Objectif de Développement Durable (ODD), qui veut que le travail des enfants sous toutes ses formes soit éliminé d’ici 2025 et parmi ses formes nous avons la mendicité en lien avec les enfants. Et, l’État malien, à travers la Cellule Nationale de Lutte Contre le Travail des Enfants (CNLTE) en charge du ministère du travail, d’emboiter le pas à ce consortium pour concrétiser les avancées des articles 6, 7 et 8 de la convention 182 de l’OIT. Plusieurs stratégies allant dans ce sens ont été abordées notamment la mise en œuvre de la convention 138 et 182 de l’OIT, le Plan d’Action National pour l’Elimination du Travail des Enfants au Mali (PANETEM2), la Feuille de route pour l’élimination du travail des enfants dans les zones de l’agriculture, la liste des travaux dangereux et des travaux légers etc., chose dont M. André Pascal Coulibaly, manager du projet JOFA ACTE témoignage et détaille 《Nous faisons des plaidoiries auprès de l’État et nous sensibilisons le monde entier contre les pires formes du travail des enfants à travers des activités et des actions aucours desquelle nous commémorons chaque année depuis l’initiative du projet JOFA ACTE les journées dédiées aux enfants, nous partons sur le terrain pour collecter des bonnes informations et les bonnes causes surtout dans les zones d’intervention du projet(Bamako et Sikasso), nous faisons des ateliers avec les acteurs Etatiques et non Etatiques, et des conférences débats abordant des thématiques sur les pires formes du travail des enfants》, c’etait lors d’un atelier. Malgré cette lutte de longue haleine que l’État et ses partenaires mènent, la mendicité et ses conséquences sont des réalités au Mali et chaque jour le nombre des mendiants s’augmente. Face à cette situation, il nous a été imposé d’aller en quête des témoignages de celles et ceux qui ont connu ou qui continuent de connaitre les affres de cette pratique humiliante et déshumanisante.
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A notre première approche nous avons A B, un natif de Sanankoroba, les écoles coraniques sont sources de problèmes pour bon nombre d’enfants au Mali. Il lamente : « Je suis natif de Sanankoroba dans la région de Koulikoro. A mon âge de sept ans normalement l’âge pour les enfants d’être inscrits à l’école, mon père m’a confié à un maître coranique à Djennè pour que je puisse lire, écrire et surtout bûcher le coran. Après trois 3 ans, le vent a visiblement soufflé dans le sens contraire, au lieu d’étudier, on nous incitait à la mendicité et aux travaux champêtres pour notre maitre coranique. L’effectif des élèves dépassait le chef qu’il ne parvenait même pas à donner à boire, à manger et surtout à soigner tous ces enfants. N’ayant plus eu le courage de supporter cette vie, j’ai décidé de m’enfuir vers Bamako avec le peu de monnaies que je mettais de coté à l’insu de notre maitre. Arrivé dans la capitale malienne où je ne connaissais personne, je me suis retrouvé à « Raïda ». Là-bas aussi, c’était un véritable enfer. « L’accroupissement est la vieille habitude du vieux chien », dit-on. J’ai fait recourir à la mendicité. La nuit je dormais aux bordures de l’Assemblée Nationale. Avec la pluralité des mendiants nationaux et étrangers, on ne gagnait pas beaucoup et j’ai enfin décidé d’adhérer à un réseau de malfrat et de négoce des produits stupéfiants. Grâce à une ONG que j’ai rencontrée, j’ai tourné le dos à cette vie et je travaille actuellement comme coursier au compte de cette ONG. Souvent ces tristes souvenirs s’éveillent en moi et me coupent le sommeil.
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Mamou Tembely, notre deuxième approche, la mère des jumeaux Adama et Awa âgés de 12 mois, elle déclare : « Depuis que j’ai perdu mon mari, j’ai eu honte de demander de l’aide à ma famille à chaque fois, c’est pourquoi j’ai décidé de mendier pour ne pas être une charge pour mes proches. Je vis dans des conditions très difficiles. Si j’ai la chance d’avoir un peu d’argent ou un emploi rémunéré, j’arrêterai de mendier». Si elle savait qu’elle était sur le point de détruire la vie de ses enfants, malgré sa situation, elle n’allait pas agir de telle façon. Voici les faits :《Adama et Awa ont tous grandi dans la mendicité sans jamais été à l’école jusqu’à leurs 12 ans. Adama, le garçon qui n’a jamais rien appris comme métier a pris la voie de la rue où il est devenu enfant de la rue. Il a commencé d’abord par faire une, deux et trois semaines sans mettre ses pieds dans la maison où vivent sa mère et sa sœur jumelle et maintenant il peut faire des mois sans se soucier d’elles. Le problème s’aggrave, la fille restée longtemps à côté de sa mère jusqu’à ses 14 ans s’est retrouvée aux ménages où elle aidait une famille riche aux travaux domestiques afin de subvenir aux besoins de sa mère. À ses 17 ans, elle a quitté ce service à l’insu de sa mère pour prendre un autre chemin sur lequel elle peut amener chaque jour 5000f ou souvent 10000f à sa mère, mais personne ne sait encore le boulot qu’elle fait, la Maman en a marre et ne supporte plus la situation elle se promène chaque jour avec ses yeux larmoyants pour la recherche d’une solution pour ses enfants》. Certes, ces faits comme beaucoup d’autres sont des réalités au Mali. Si la protection des droits de l’enfant est un devoir de tout Etat qui veut un avenir meilleur ce genre des choses doivent être des priorités à lutter.
Selon Amadou Thiam, directeur de la cellule nationale de lutte contre le travail des enfants lors d’une intervention où il a fait le point comment la mendicité est-elle l’une des pires formes du travail des enfants. la mendicité même, dit-il, est interdite à plus fort raison lorsque ça concerne les enfants. Aussi, ajoute-t-il, qu’elle fait partie de l’exploitation des enfants, c’est-à-dire, de commander les enfants à un travail qui comporte beaucoup de risques. 《 C’est vrai que c’est une ancienne pratique qui a fait son temps et que beaucoup d’entre nous ont passé par à travers la voie du maître coranique, mais on en fait maintenant à d’autres visages et c’est cette nouvelle forme qui est appelée pire forme du travail des enfants et elle est à combattre parce qu’on connaît déjà les conséquences 》, a laissé attendre M. Thiam avant de dire qu’il y a de travail dont le début n’est pas dangereux, mais qui peut en découler des conséquences sur les enfants, doit être interdit et combattu comme les pires formes du travail des》. Il a conclu ses propos en faisant savoir qu’ est conconsidéré comme enfant, toute personne humaine âgée de moins de 18 ans et qui n’a pas atteint l’âge de la majorité par dispositions spéciales( Le code de protection de l’enfant adopté par l’ordonnance N°02-62/P-RM du 05 juin 2002).
Pour y remédier, il est urgent pour l’Etat de renforcer certains points et de chercher des solutions idoines. Il s’agit notamment de l’amélioration du système éducatif national où le processus d’intégration des écoles coraniques dans le système scolaire formel doit être accéléré, l’application immédiate et le renforcement de certaines mesures législatives, la mise en place d’une alternative financière afin de prévenir à la pauvreté, la création de centres de formation professionnelle pour la réinsertion des enfants talibés dans la vie socioéconomique recommandée lors des Assises Nationales de la Refondation(ANRs) etc.
Sans ces mesures, la lutte contre le travail des enfants notamment ses pires formes ou encore la mendicité connaitra des difficultés ou des blocus dans le pays et les droits de l’enfant seront toujours violés.
Youba Doumbia….