L’annonce du président colombien, mercredi soir, fut triomphale. « Je tiens à informer que Dairo Antonio Usuga, alias Otoniel, a été extradé », a lancé Iván Duque. Chef du Clan del Golfo, Otoniel, le plus grand narcotrafiquant de Colombie, est désormais aux États-Unis où il est réclamé par un tribunal de New-York. Mercredi, « la légalité, l’État de droit, la force publique et la justice triomphent », s’est félicité le dirigeant colombien.
Pour Iván Duque, « ce criminel de la pire espèce (…) ne peut être comparé qu’à Pablo Escobar », le cofondateur du tristement célèbre Cartel de Medellín, abattu par la police en 1993. Otoniel, dit-il, est le « trafiquant de drogue le plus dangereux du monde, meurtrier de leaders sociaux et de policiers, violeur d’enfants et d’adolescents ».
Des proches des victimes d’Otoniel avaient demandé une « suspension » de l’extradition, estimant que cette procédure allait « soustraire à la justice un chef paramilitaire qui a commis des crimes contre l’humanité dans notre pays ». Ils invoquaient leur droit de connaître la vérité et de recevoir des réparations. Mais la justice colombienne a finalement donné son feu vert à son extradition.
Une fois sa peine accomplie aux États-Unis, le chef du Clan del Golfo « reviendra en Colombie payer pour tous ses crimes commis dans notre pays », a assuré Iván Duque. Ce dernier a « remercié » la Cour suprême, le Conseil d’État ainsi que la JEP – une juridiction spéciale enquête sur le conflit armé en Colombie – « pour avoir évité les manipulations intentionnelles de ce criminel pour tenter d’éviter cette extradition ».
La détention sous haute surveillance à Bogota du baron de la drogue a été marquée par plusieurs incidents et polémiques. Des enregistrements de ses témoignages devant la Commission de la vérité, instance qui enquête sur les violations des droits humains pendant le conflit armé en Colombie jusqu’à la signature de l’accord de paix de 2016, ont été volés par des inconnus. La police colombienne avait également interrompu une audition d’« Otoniel », disant soupçonner une tentative d’évasion.
Selon la presse, citant un document de la JEP, « Otoniel » aurait mis en cause 63 personnes, prétendument liées au Clan de Golfo, dont un ancien ministre, un ancien directeur national des services de renseignements, six anciens gouverneurs et quatre anciens membres du Parlement. D’après ses avocats, le baron de la drogue a affirmé également avoir organisé sa reddition.
En cinq décennies de guerre contre la drogue soutenue par les États-Unis, la Colombie a tué ou capturé plusieurs barons de la drogue, le plus connu du grand public étant Pablo Escobar auquel une série télévisée a été dédiée. Mais le pays reste premier producteur mondial de cocaïne et les États-Unis le principal marché, tandis que les violences liées au trafic perdurent.