Il faut reconnaitre à la MINUSMA sa surprenante résilience dans un environnement hostile dès les premières heures de son déploiement au Mali. Perçue très tôt comme « une simple parade », aujourd’hui la question de son maintien ou pas n’a jamais été aussi incertaine. D’ici quelques semaines, la question de son renouvellement sera à nouveau mise sur la tribune du Conseil de Sécurité des Nations-Unies. Avec, peut-être, un bouleversement de son mandat.
Les autorités de la Transition iront-elles jusqu’au bout de leur logique diplomatique en demandant expressément le départ de la mission onusienne au Mali ? Voilà la question que beaucoup se posent au vu des prises de position fortes de Bamako post coup d’État Acte II. Car le Mali d’aujourd’hui serait celui du jusqu’auboutisme diplomatique. Pour rappel, l’État malien n’hésita pas à « chasser » la France sur le plan militaire et de demander le départ de son ambassadeur du territoire national. S’en est suivi une salve d’incompréhensions à l’international, notamment au sein de la Mission onusienne où nombres de pays ont annoncé leur retrait pure et simple. L’Allemagne, grand allié de poids sur le plan sécuritaire, après quelques hésitations, a elle aussi annoncé son départ de la Mission d’ici le mois de mai de l’année 2024.
Résultat, le Mali aurait frustré sur le plan diplomatique tout un versant du monde, celui de l’occident. Considérant l’impopularité de la MINUSMA dans une grande partie du pays, le moment idoine est peut-être venu pour la Transition de demander son départ. Sans oublier qu’elle a demandé que la France ne soit plus son porte-plume auprès des Nations-Unies. Toutes les conditions semblent donc réunies. Sauf qu’il semblerait que les autorités maliennes reconnaissent quelque part une certaine utilité à la MINUSMA. À moins qu’elles ne butent sur des considérations diplomatiques, notamment le fait que Russie et Chine soient plutôt pour le maintien de la MINUSMA. Car pour rappel l’an dernier, ces deux pays, forts de leur veto, se sont abstenus du vote lors de la question du renouvellement. Ou qu’elles se sont justes alignés sur la position du gouvernement de Transition qui avaient formulé des réserves sur la Résolution. Un fait important à souligner, Il faut un consensus global au Conseil de Sécurité pour que la MINUSMA soit renouvelée et un accord express des autorités maliennes.
Dans un examen interne publié janvier dernier, le renouvellement de la Mission se fera selon trois alternatives : une augmentation des effectifs ; une reconfiguration à effectifs constants ; ou une transition vers une « mission politique », sans Casques bleus. Mais ce que Bamako demandait depuis près d’un an c’est de mettre un accent particulier sur le volet sécuritaire de la Mission tout en évitant une « certaine instrumentalisation des questions des droits de l’Homme » à des fins de ternir l’image du Mali. Juin prochain, s’il est probable que la Mission soit renouvelée, sa reconfiguration, elle, s’annonce très compliquée.
MINUSMA, des tares congénitales difficiles à corriger
Dès le départ, le diagnostic concernant la crise malienne n’a pas été le bon, de part de la Communauté internationale. Comme toutes les autres missions de maintien de la paix, la MINUSMA se retrouve dans un contexte où, comme l’a déjà reconnu Antonio Gutteres himself, il n’y a pas de paix à maintenir. Au Mali, au-delà des problèmes de rébellion, le principal problème comme un peu partout dans le Sahel, c’est la lutte contre le terrorisme. Lutte qui comprend un volet naturel qui est celui militaire mais aussi une autre composante toute aussi importante, voire plus, celle du développement. Car le lit du terrorisme et de tout banditisme de grand chemin, c’est la misère.
Les Nations-Unies se bornent dans un concept idyllique de neutralité qui, à l’épreuve du terrain, est contreproductif. Et fait encore plus saisissant, les premières victimes de la MINUSMA sont les casques bleus de la Mission eux-mêmes. L’histoire retiendra qu’elle est la plus meurtrière de toutes les missions onusiennes concernant les casques bleus. L’idéal, c’est de doter la Mission d’un mandat offensif avec à la clé une recomposition de ses effectifs. Car pour lutter valablement contre des terroristes aguerris, il faut avoir en son sein des éléments qui le sont tout autant.
L’Accord pour la Paix et la Réconciliation qui est la matrice de la Mission ne correspond pas aux réalités de la configuration de belligérance sur le terrain. Le jusqu’auboutisme est aussi peut-être ce que suit l’ONU au Mali.
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